Articles sur la classe, les pratiques, les élèves. Article 1 Lire plus ...
Pilotage pédagogique (direction d’école)
Pour faire suite au webinaire auquel j’ai participé concernant les directeurs (j’en parle dans l’article sur la liberté pédagogique), je partage quelques idées fortes qui pour moi doivent guider le pilotage pédagogique des directeurs et directrices d’école. A l’heure où la fin d’année se rapproche, où la prise de futurs postes de direction va s’annoncer pour certains, il peut être fructueux de prendre un temps d’introspection sur cette question fondamentale.
Premiers pas
À la rentrée, lors de l’arrivée en tant que « jeune » ou « nouveau » directeur (ou directrice), quelques points me semblent importants à poser :
- les règles de communication au sein de l’école: comment l’information est partagée. Quels canaux (mail, casier papier…), quelle hiérarchisation des informations (comme trier entre l’urgent, ce qui est à réfléchir mais attendra la prochaine réunion…), etc. En lien direct avec cela : comment sont organisées les réunions statutaires (conseils de maitre, de cycles, d’école…). Qui préside, qui fait le secrétariat, etc. Non ce ne doit pas toujours être le directeur…Les textes sont clairs là-dessus.
- les règles de fonctionnement de l’école: aborder les questions pratiques permet déjà d’affirmer sa posture et sa vision de l’école. Cela se fait autour de choses simples: la gestion de la coopérative, les services de récréation, l’ouverture des portes de l’école, qui réserve les cars pour les sorties, etc. Parfois, il y a un attendu que tout cela incombe au directeur « car toi, t’as une décharge pour ça ». Que nenni. La décharge correspond à une charge de travail et une responsabilité bien suffisantes. Ces questions de fonctionnement n’appartiennent donc pas plus au directeur qu’aux collègues de l’école ! Et clarifier qui doit faire quoi permet d’anticiper de futures situations de conflits.
- les modalités de travail sur les sujets de fond : piloter une école c’est avoir une vision, des ambitions au service des élèves. Cela nécessite de prendre le temps de la réflexion, que ce soit sur les évaluations nationales, sur les programmes, la constitution de programmations communes, les sanctions à l’école, la liberté pédagogique et tant d’autres sujets…Comment s’organise-t-on collectivement ? Comment chacun prend sa part ? Imaginer des formats de travail qui ne s’arrêtent pas à la simple réunion présentielle : une réunion préparée en amont par la transmission par le directeur d’éléments de réflexion, solliciter l’apport d’une ressource extérieure (CPC, pole ressource…), faire travailler les collègues en groupes de réflexion avec chacun un pilote, un objectif, etc.
La posture
Etre directeur ou directrice d’école s’incarne dans la posture. Rien à voir avec des questions d’autorité fonctionnelle ou non, de textes ou je ne sais quoi. Non, c’est quelque chose qu’on porte comme on porte le fait d’être professeur. Il s’agit de manager/diriger/animer/piloter/accompagner/autreverbedevotrechoix… l’équipe de l’école. Mais quelle posture voulez-vous adopter ? Souvent on s’inscrit inconsciemment dans un mélange de postures variées, comme par exemple :
=> une posture autocratique: il n’y a que ça qui marche…pas de débat, c’est « moi le chef »…
=> une posture démocratique: on décide tout collectivement, quitte à ne jamais rien acter faute de majorité
=> une posture paternaliste: ils sont tous mes enfants, il faut les couver…
=> une posture situationnelle: je gère au jour le jour, selon la situation, selon les personnes
=> une posture bureaucratique: les textes, rien que les textes, vive les textes…
=> une posture de serviteur: je suis au service des collègues, pour leur faciliter la vie…
=> une posture visionnaire: moi je sais, il faut qu’ils me suivent, c’est pour leur bien…
=> une posture laissez-faire: moi je ne suis pas chef, faites ce que vous voulez, c’est pas mon problème….
Et on pourrait en voir d’autres encore…Aucune n’est pertinente par elle-même. Une posture adéquate est une posture incarnée, équilibrée, intelligente. Derrière cette posture incarnée, il y a des mots clés à mon sens et des principes de pilotages : la responsabilité, les valeurs, la vision, l’engagement, la transparence…
La responsabilité
Un mot important. Galvauder, esquiver à coup de parapluie…J’ai la conviction profonde que c’est le sens des responsabilités qui doit animer la fonction de directeur. Le porter soi et l’exiger des autres. Derrière cette notion de responsabilité, il s’agit d’oser prendre des décisions, de les assumer ensuite (pas de volte-face en cas de tempête), de faire preuve d’intelligence du terrain pour savoir exploiter les marges de manœuvres potentielles, etc.
Et contrairement à ce que pensent certains, il n’y a pas besoin d’un statut de « chef » pour exiger certaines choses de la part des personnels de l’école ou des parents, lorsqu’il s’agit juste d’appliquer les textes, de faire en sorte que l’école fonctionne ou d’agir sur la base de valeurs humanistes.
Etre un directeur responsable c’est donc assumer son rôle. Il y a des choses qui sont négociables et d’autres qui ne le sont pas. Et cela doit être posé avec l’équipe et appliqué avec justice et équité. On ne négocie pas sur les valeurs, ou sur les règles de sécurité. On négocie sur les règles de fonctionnement pratiques (l’heure des récréations, l’organisation d’un planning…).
Les valeurs
C’est pour moi le cœur des métiers d’enseignant, de directeur. Quelles valeurs je porte, j’incarne, en tant que directeur / directrice ? Comment je me positionne par rapport aux valeurs de l’école ? Comment je promeus l’intérêt général ? Globalement, il s’agit a minima de : l’humanisme, la bienveillance ( pas d’abus de langage, d’excès, bienveillance implique le cadre !), l’intégrité (et derrière cela l’éthique et la déontologie), l’engagement envers les valeurs républicaines, mais aussi la justice, l’acceptation de tous et de toutes (inclusion…), l’humilité (accepter d’être faillible)…
Les valeurs ne se décrètent pas. Il ne suffit pas de les énoncer. Elles se portent dans les actes du quotidien, dans la gestion et le pilotage de l’école.
La vision
Piloter, pour certains jouer le rôle d’un leader, implique d’abord une vision, une vision porteuse de sens. Savoir où on est, où on va et comment on y va. La vision doit être portée par les valeurs de l’école et ambitieuse, au service des élèves. Cette vision doit aussi être partagée, construite aussi collectivement.
Pour cela : informer, suggérer, susciter l’envie, favoriser l’équipe, s’ouvrir à d’autres pratiques…
La communication
C’est la clé du bon fonctionnement au quotidien d’une école et de son pilotage. C’est la traduction concrète du sens des responsabilités, des valeurs et de la la vision. Bien communiquer est essentiel : savoir écouter, dialoguer pour pouvoir collaborer pleinement avec les collègues, les personnels, les parents…Sans communication, difficile d’assurer une bonne coordination entre les enseignants par exemple.
Communiquer passe aussi par des choix : quoi communiquer, comment, quand…Pour ma part, je pense que la transparence et le partage sont indispensables, c’est à dire expliquer ce qu’on fait, comment et pourquoi on a fait ou on a décidé telle chose. Sans transparence, on ouvre la porte à la suspicion, à l’imagination …
La communication dans le pilotage pourrait se résumer en trois étapes: accueillir/recueillir l’information, décider collectivement de ce qu’on en fait puis agir.
Et concrètement ?
=> Donner du sens au travail de chacun. Valoriser chaque membre de l’équipe à sa juste place. L’équipe ne s’arrêtant pas aux professeurs mais aussi aux personnels qui gravitent dans et autour de l’école: atsem, aesh, personnels municipaux, intervenants extérieurs…
=> Faire confiance et pouvoir compter les uns sur les autres. Par exemple en déléguant une tâche à un collègue sans chercher à « vérifier » derrière.
=> Apporter de la clarté, de l’information. La transparence dans les actes est fondamentale pour assurer une ambiance saine et une forme de sécurité psychologique.
=> Créer un climat qui permette à chacun de s’exprimer librement, sans jugements, sans crainte de paraitre incompétent.
Pour mener à bien ces objectifs concrets, on peut ainsi :
- reprendre les différents points présentés en début d’article qui sont les bases de fonctionnement,
- exploiter et optimiser les temps de réunion, sans perdre de vue la nécessité d’une certaine convivialité.
- proposer des temps de formation courts pendant certaines réunions (avec une aide extérieure, des outils de formation en ligne, etc)
Merci Nicolas pour cet article aussi synthétique qu’indispensable. Il aura le mérite de poser les intangibles valeurs et actions cardinales de tout « manager » d’équipe (faut-il avoir peur du terme ou le récuser 🤔)
Au plaisir de te retrouver loin des écrans
Merci pour ce beau résumé de cette fonction délicate…mais ô combien passionnante quand on aime les rapports humains !
Bonjour,
Je prends plaisir à lire vos articles et cela m’encourage , je me sens moins seule à assumer cette lourde responsabilité , je vous en remercie
Merci pour ce retour. C’est effectivement une lourde responsabilité; Il faut que tous, à tous les niveaux, en aient conscience 😉
Tellement juste Très agréable de lire ces mots qui donnent confiance. Je pourrais ajouter que la posture sert à avoir et faire autorité sans être l’autorité. Avec un équilibre confiance/contrôle qui prend en compte la responsabilité de chacun.
Merci pour cet article.
Excellente remarque sur l’autorité. Je valide totalement !